Entre 1985 et 1988, tandis que le journaliste Jean-Paul Kauffmann était contraint d´endurer le calvaire de la vie d´un otage englouti dans une des geôles du redoutable Djihad islamique, et était aux prises avec un défi sans précédent que lui posait un enlèvement, fortement à la merci de hideux ravisseurs impitoyables enfouis dans les entrailles de leur lugubre tanière, sa famille, son épouse et ses deux enfants, avait la tête en proie aux pires effarantissimes gouffres de souffrances psychologiques insurmontables engendrées à force de réflexions fort accablantes dont on n´arrivera nullement à se faire une idée.
Or, une fois que s´étaient écoulées une trentaine d´années, Grégoire Kauffmann, l´un des deux fils de Jean-Paul, en dépit du fait que son innocente innocence à 11 ans fut grièvement voire sauvagement meurtrie, a fait en sorte que dès lors son talent d´historien se soit révélé au grand jour grâce à ce récit de ces si angoissantes années noirissimes – Ô combien poignantes ! –, un témoignage cauchemardesque jonché des effets dévastateurs hyper anéantissants, décryptant cet interminable glas qui ne cessait de retentir dans sa petite tête ainsi que les méandres de la négociation internationale.
A savoir :
Hezbollah, c´est une terrible terrifiante organisation terroriste chiite.
Le tapage médiatique qu´avait suscité cette macabre histoire, a abouti à la libération de cet homme, ayant étouffé le silence que certains préconisaient en tant qu´issue.
Avez-vous hâte que ce passé si émouvant, tressé par les souvenirs d´un enfant, vous saute à la figure?
Pour clore, tout en sachant que la libération du journaliste Jean-Paul Kauffmann s´est produite entre les deux tours de la présidentielle de 1988, ce cas de libération, d´après vous, s´agirait-il d´une pure coïncidence ou bien faudrait-il plutôt envisager qu´il y aurait eu une force motivante dans les contrées du domaine politique ?
Quoi qu´il en soit, ce à quoi je vous convie dès maintenant c´est à lire – Que dis-je : décortiquer ! – un extrait issu des premières pages :
Le samedi 25 mai 1985, enfin libres. La sonnerie de 12h30 vient de retentir. Elle annonce un week-end prolongé. Trois jours de relâche, lundi de Pentecôte en bonus. Dans les couloirs, les meneurs de la classe braillent aux oreilles des filles les paroles du tube de l’année : «Mélissa, métisse d’Ibiza, a des seins tout pointus». Trois semaines plus tôt, ils ont écopé d’un avertissement pour l’avoir interprété en rigolant sous le nez des pionnes. Ils récidivent en dévalant l’escalier qui les mène vers la liberté. […]
Je cherche du regard la Renault 9 blanche qui doit m’emmener loin d’ici. Ouf, elle stationne à l’angle de l’avenue Marc-Sangnier. À l’avant, ma mère et ma grand-mère. Derrière elles, mon petit frère Alexandre. Je grimpe à ses côtés sur la banquette. Direction Les Braudières, lieu-dit à Montrieux-en-Sologne. Mes parents y louent une ancienne ferme à l’année.
La présence de ma grand-mère Imelda Brunerie, née Le Garrec, annonce rarement une ambiance sereine. Bavarde, raisonneuse, se faisant fort de redresser nos manières d’enfants gâtés, l’énergique et envahissante Bretonne suscite chez sa fille un raidissement, une nervosité qui altèrent sa patience face à nos chahuts. D’autres nuages semblent voiler l’humeur de ma mère. Mercredi, mon père s’est envolé pour Beyrouth. Retour prévu le mercredi suivant, 29 mai, jour anniversaire des dix ans de mon frère Alexandre. Le lendemain de son départ, chez ma tante Armelle à Carrières-sur-Seine, ma mère a passé toute la soirée au téléphone. À travers les mots saisis au vol derrière la porte du bureau où elle s’était barricadée, j’ai compris qu’il était question de mon père. Une anomalie vaguement inquiétante semble s’être glissée dans le dispositif des adultes. L’énervement est palpable sous l’habitacle de la Renault qui file vers le périph. […]
L’après-midi s’étire dans l’ennui, bavardage d’Imelda en sourdine. Je file par le chemin qui mène à la rivière et aux étangs. À mon retour, la cour des Braudières est en plein branle-bas. Aux injonctions d’Imelda, aux commandements aigus de ma mère se mêlent les pleurs de mon petit frère Alexandre et le grésillement de la radio portative qui résonne dans la cour. Que dit cette radio que les deux adultes cherchent à couvrir de leurs voix ? J’essaie de m’approcher du poste. Imelda me fait barrage. M’engueule. Mais les mots du flash info filtrent jusqu’à mes oreilles. Beyrouth, Jean-Paul Kauffmann, disparition, taxi, Michel Seurat, aéroport, barrage, mitraillette. Souvenirs de Joëlle Kauffmann : « Ma mère a dit : “Les enfants, taisez-vous ! N’écoutez-pas !” Et ils ont cru un instant que leur père était mort. »
De guerre lasse, Imelda et sa fille finissent par lever l’interdiction faite aux enfants d’écouter les nouvelles. Au journal télévisé de 20 heures, regardé tous ensemble ce soir-là, la reprise des mêmes mots accompagne des images de ruines, de tirs d’obus et de foules libanaises en colère. Beyrouth venait de s’inviter dans la famille. […]
Très intéressant ! Merci
RépondreSupprimer