22 nov. 2020

Maurice Genevoix, chroniqueur de l’horreur, la plume de la vie de milliers de Poilus, ces inconnus de 14-18 morts en héros sacrifiés et ayant basculé dans l’oubli, est d´ores et déjà le nouveau pensionnaire enseveli sous les honneurs du dôme prestigieux du Panthéon, le mausolée des gloires françaises pour l´éternité

La commémoration du 102e anniversaire de l’Armistice de 1918 a été marquée cette année par une double émouvante panthéonisation solennelle, un bel hommage officiel rendu à la fois au lieutenant Maurice Genevoix et aux Poilus. 

Les cendres de Maurice Genevoix croupissent désormais et à jamais depuis le 11 novembre, quarante ans après son décès, dans la crypte du temple laïque de la République, une demeure abritant des morts fort estimables, des âmes grandioses envers lesquelles la patrie est éternellement reconnaissante ; les cendres d´un homme ayant enduré l'horreur et côtoyé la mort de près dont il a été épargné lors de la Grande Guerre en tant que combattant aux côtés de tous « ceux de 14 » et de toutes « celles de 14 », une cohorte de jeunes braves gens dont la vie a été fauchée dans des conditions effroyables, de pauvres victimes ayant été envoyées à l’abattoir ; et ayant réussi à se frayer un chemin dans le linceul où la jeunesse de tant de Poilus a mortellement péri. 

A savoir : 

"Ceux de 14 " c´est le titre du plus célèbre ouvrage lié à la littérature de guerre de Maurice Genevoix, ce talentueux témoin si saisissant de la hideuse cruauté du premier conflit mondial, rassemblant avec une scrupuleuse impeccable exactitude cinq remarquables récits de guerre, des témoignages littéraires magistraux qui ont immortalisé la mémoire des Poilus: "Sous Verdun", "Nuits de guerre", "Au seuil des guitounes", "La boue" et "Les Eparges" où il a dépeint la vie angoissante de toutes ces âmes massacrées autour de lui, une nation combattante meurtrie et engloutie dans les entrailles de l´enfer redoutable des tranchées, dans la sanglante boucherie des champs de bataille, ayant franchi tous les seuils boueux de l´atroce force démente qu´a été la fureur du carnage perpétré lors de la «der des ders». 

Le dernier Poilu, Lazare Ponticelli, s’est éteint le 20 janvier 2008 à l’âge de 110 ans. 

Pour clore, sachez que par Maurice Genevoix, « la voix de tous les Poilus ne cesse de nous exhorter à ne pas baisser la garde et à conserver intacte notre vigilance quand le pire de nouveau réapparaît ». Un message fort importantissime en ces temps troubles et incertains où la France est contrainte d´affronter l´épouvantable pandémie, l´exécrable terrorisme et bien d´autres abominables maux la métastasant peu à peu. 

Et sachez aussi que comme l’École a un rôle essentiel à jouer dans l’enseignement de l’histoire et la transmission de la mémoire auprès des élèves, je vous joins alors ci-dessous un extrait de ce témoignage si poignant, si terrifiant s´étant glissé dans les pages de "Ceux de 14". 

 SAUVÉ PAR UN MOURANT 

 18 février 1915 aux Éparges. 

Je me suis arrêté, pour mieux voir. Il y a un homme couché sur le dos, la tête posée sur les reins d'un second, déjà presque enfoui dans la boue; il y en a un troisième, à genoux, et qui ne bouge pas plus que les deux autres. Ils sont morts: deux d'entre eux, je le vois, depuis quelques minutes peut-être [...]. Il faut m'approcher un peu plus, chercher des yeux la place où je poserai mes pas: ici, sur cette claie qui émerge; un peu plus loin, contre le flanc de l'homme allongé sur le dos. Je ferai mon possible pour ne pas écraser sa main. Oh !... Elle vient de bouger, cette main ! Et l'homme soulève la tête et me regarde intensément. Je m'approche, en rampant, avec un coup d'œil en arrière vers l'entonnoir meurtrier. Je ne vois pas les sacs à terre; je rampe; les yeux de l'homme vivant sont maintenant tout près des miens. Il essaie de parler, balbutie quelques sons d'une voix gargouillante, et me regarde, me regarde encore. "Où es-tu touché ?" Il secoue la tête. "Prends patience... Je descends, tu vois... Je vais ramener les brancardiers." Encore une fois sa tête remue de droite à gauche: non, ce n'est pas cela. Sa main se soulève faiblement; son regard qui appuie, qui s'attriste de ne pouvoir se faire comprendre devient presque intolérable. "... en... on... ai... ué..." Est-ce possible ? Est-ce bien cela qu'il veut me dire ? "Que je fasse attention ? Que je vais me faire tuer ?" Le regard s'apaise, s'illumine; et les paupières disent oui, sans que la tête bouge désormais. Savoir son nom, le lui demander. Il a dû recevoir une balle dans la moelle; il est là paralysé, muet; nous avons deux morts pour témoins. Lentement, douloureusement, j'arrive à me glisser entre son corps et la paroi. Les Boches de l'entonnoir ont dû m'apercevoir: ils ont tiré, un peu trop haut. 

 M. Genevoix, "Ceux de 14", "Les Éparges", Seuil, "Points", 2008, pp. 664-665.

7 commentaires:

  1. Paix à ton âme, Maurice Genevoix; je prie pour que vous ayiez une vie éternelle à la mesure de votre dévouement et de votre engagement à-t-être la voix de ceux qui ont été déchirés par la folie de la violence humaine...; tel que Carmen dit, la mort vous épargna dans les tranchées quand tu marchais sur des cadavres mais il ne t’a privé d´aucune souffrance...paix à ton âme, je dis; il n’y aura jamais de monument à la hauteur de rendre hommage à ta mémoire, brave soldat...!

    J’ai toujours été impressionnée par les histoires de batailles au corps à corps, où les champs sont remplis de corps démembrés et de rivières de sang; lors de longues années, la vie des combattants et de leurs familles est une chronique des sursauts, des explosions et des horreurs où l´on voit l´ennemi venir...

    De nos jours, nous sommes de nouveau sur un champ de bataille avec un ennemi d’autant plus dangereux que moins visible et, et quand je vois la vie de ceux qui m’entourent et la mienne si changée aussi que l’économie et la politique entre les mains de quelques-uns face à l’impuissance du citoyen à ne pouvoir rien faire je me dis qu´il est plus nécessaire que jamais de se dire : si les formes changent, que l’essence des choses ne se transforme pas, le fond de l’être humain, notre esprit, qu´ils fassent toujours partie de notre patrimoine personnel, immatériel...; autrement dit: que l’être humain ne perde pas, ni la dignité, ni l’humanité, dans la bataille contre l’invisible, qui est non seulement le virus, mais toute la restructuration de la société qui est en arrière...

    Merci, Carmen; bonsoir à tous...

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  2. Sans aucun doute, Monsieur Genevoix nous transporte le conflit à travers ses inoubliables histoires. En écrivant « La Boue » il nous décortique à la première personne son expérience en tant que soldat de guerre. D’ailleurs, en parcourant ses ouvrages il nous transmettre comment l’espoir dégouttelant/ dégoulinant de la vie, la fortissime angoisse et l’épouvantable rancœur se fondent dans un récit intime.

    Autrement dit, Maurice nous dévoile les jours si fatigants et insatiables que les vétérans de guerre supportent. D’après moi, je recommande cet écrivain en raison de son écriture fière à la fois que juste de l’histoire originelle, l’histoire des guerres mondiales. Par ailleurs, c’est une invitation à réfléchir sur les moments plus durs de la vie en profitant en même temps les secondes que la vie nous offre. En guise de conclusion, elle nous permettra de tenir compte les petits détails entourant l’âme d’un être humain.


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  3. Hommage nécessaire à Maurice Genevoix compte tenu du fait que son témoignage à propos de la guerre devrait être présent à nos jours.Vu notre situation actuelle si tendue et crispéé,on aura besoin de transmettre un approfondissement de memoire historique afin de prévenir de conflicts dans le futur. C'est por ça que ces textes Ci-dessus vont montrer d'une façon cruelle un conflict dépouillé d'euphémismes,dure mais à la fois nécessaire.Merci de vos points de vue.

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  4. Marie Angèle et Anne Marie Cabrejas vous proposent de lire :

    1918, ce n'est pas si loin que ça ! A peine un clin d‘œil dans l´Histoire.
    Il aura pourtant fallu 102 ans pour remémorer le courage, la témérité de ces millions de jeunes qui ont donné leurs vies pour la France, sapés dans la fleur de l’âge, morts ou disparus au champ de bataille loin de tout et de tous. Des vies parties avant même d’avoir vécu, simples pions d’un échiquier sur lequel se sont affairées des mains voulant changer le monde ou imposer des idéologies nées dans des cerveaux tourmentés, diaboliques, à n’importe quel prix, dans le plus profond des mépris envers leurs semblables, simple chair à canon, faisant fi des terribles conséquences que cette guerre puis celle de 40-45 et bien d’autres encore auraient sur l’avenir de l’Europe dont nous commençons à peine, à l’heure actuelle, à en entrevoir les dégâts (des millions de morts = des millions de descendants non-nés qui auraient contribué au bénéfice de nos pays).
    Rendre hommage aux Poilus ou à Maurice Genevoix est déjà le 1er pas pour faire revivre l´héroïcité de ces vaillants Français en leur accordant une place d’honneur dans l‘Histoire.
    Cependant, il est à souhaiter que le Panthéon ne soit pas uniquement saisi comme geste de propagande politique à un moment où la France et l'Europe toute entière traversent une époque agitée, voire inquiétante.
    L’école est effectivement appelée à lutter contre l’oubli et l’ignorance.
    Or, ce ne sont pas seulement les étudiants qui se doivent de puiser dans les annales du passé.
    Nos dirigeants, ceux qui se couvrent de solennité lors de commémorations diverses, devraient aussi en tirer la leçon, replonger dans l’Histoire pour éviter de nous faire tous couler à nouveau dans le désastre.

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  5. Maurice Genevois meurt ! Écrivain et poète français né en 1890 et mort en Espagne à l'âge de 90 ans. Héros de la Première Guerre mondiale, il a combattu comme lieutenant jusqu'à ce qu'il a été blessé.

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  6. Très intéressant article à lire de nos jours, nous qui vivons une "guerre" à ce temps-là. Comme bien a contemplé Maria Isabel, il est crucial de savourer chaque seconde de nos vies, même dans des temps difficiles on est bien chanceux de vivre où on vit et pendant cette période.
    Maurice Genevoix, à travers ces mots nous montre cette chance qu’on valorise peut être pas. Il nous aide à comprendre tout ce que le passé a signifié pour des générations avant nous.

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  7. Cet article est très intéressant, il est très important de connaître ces histoires sur la culture générale de la France.

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