Ayant déjoué tous les pronostics alors qu´ils misaient sur une victoire de la très très populaire Amélie Nothomb, un siècle après Proust, Jean-Paul Dubois est désormais lauréat du Goncourt 2019 pour son roman au titre à rallonge intitulé « Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon ».
Une histoire à la fois drôle et bouleversante d´un gardien d´une maison de retraite de luxe, Paul Hansen, qui a saboté sa vie et que vous aurez envie de réconforter, de consoler.
Tout en ayant fait déferler ses talents de concierge bienveillant, de réparateur des âmes et de consolateur des affligés, cet homme se retrouve sous les verrous, incarcéré au pénitencier de Montréal. Il purge sa peine dans une minuscule cellule glacée avec un homme, emprisonné pour meurtre et phobique des souris ainsi que des ciseaux des coiffeurs.
Une histoire où il est question de narrer cette amitié entre ces deux hommes que tout oppose, contraints de vivre dans le même cachot et dont les vies ont terriblement chancelé, déraillé, des vies bousculées et fortement accablées de malheurs.
Petit à petit, au fil des pages, on nous retrace le passé de Paul, son existence aux côtés de personnages extraordinaires et la raison de son incarcération. Pour tenir, Paul, un homme endeuillé, dialoguera avec ses morts: sa compagne Winona, son père, sa mère, sa petite chienne Nouk, des dialogues qui lui permettront d’être en paix avec lui-même.
Cet ouvrage constitue, en d´autres termes, une fiction où l´on dissèque le parcours d’hommes de bonne volonté qui finissent par tout perdre, leurs proches, la foi, la liberté, l’honneur, leur métier, leur rôle social, le contrôle de leur vie ; une plongée dans l’art de gâcher sa vie, des vies étriquées, semées de pertes douloureuses, où tout bascule ; un récit empli de regret où l´on montre un monde en train de disparaître pour être remplacé par un autre dominé par l'injustice et le mépris et où l’échec rayonne ; un manifeste littéraire contre toutes les formes d’injustice, explorant les méandres de l´âme humaine ; un regard percutant jonglant avec la noirceur teintée d´un humour empreint d´une grande mélancolie fort mélancolique et d'un profond désarroi saluant les perdants tout en faisant défiler des souvenirs d’un bonheur anéanti ; un poignant hommage aux morts tissant un bel hymne aux êtres aimés disparus ; un texte émouvant se déployant entre le temps de la prison et les flashbacks, et pas dénué de suspense. Bref, un Goncourt irrésistible qui vous tiendra en haleine jusqu’au bout et qui vous fera certainement fondre.
Voici ci-dessous un extrait de ce roman nostalgique sur le bonheur perdu et le poids du passé:
" Il neige depuis une semaine. Près de la fenêtre je regarde la nuit et j’écoute le froid. Ici il fait du bruit. Un bruit particulier, déplaisant, donnant à croire que le bâtiment, pris dans un étau de glace, émet une plainte angoissante comme s’il souffrait et craquait sous l’effet de la rétraction. A cette heure, la prison est endormie. Au bout d’un certain temps, quand on s’est accoutumé à son métabolisme, on peut l’entendre respirer dans le noir comme un gros animal, tousser parfois, et même déglutir. La prison nous avale, nous digère et, recroquevillés dans son ventre, tapis dans les plis numérotés de ses boyaux, entre deux spasmes gastriques, nous dormons et vivons comme nous le pouvons. "
A savoir:
Le lauréat du Goncourt ne touche qu'un chèque symbolique de 10 euros, cependant il récoltera une colossale somme d´argent : la vente s´écoulera en moyenne à 500.000 exemplaires dû au fait d´avoir décroché un tel sacre garantissant une notoriété hyper grandissime.
Je trouve le sujet du roman très intéressant et même pédagogique à nos jours: dans un monde globalisé où peut-être notre avenir pourra nous faire convivre avec qui ne pourrions même imaginer, il ne reste que la bonne humeur pour en sortir triomphantes et ce livre nous donne quelques clés pour cela...
RépondreSupprimerFélicitations, Jean-Paul Dubois...!j´ai déjà vraiment envie de lire ton livre...!
Merci, Carmen, pour nous renvoyer l´actualité...
Inma.